LA POSTE TRAITERA-T-ELLE LE MARCHE DE L’ISA EN CAS DE GENERALISATION DU OUIPUB?

C’est officiel : c’est le groupe LA POSTE qui récupère l’activité de distribution non adressée, qui avait été séparée du groupe en 2002, suite à une demande de la commission européenne qui estimait, à juste titre, que le groupe LA POSTE exerçait une concurrence déloyale en utilisant les équipements du service public de la distribution du courrier pour exercer une activité concurrentielle (l’ISA). Retour à la case départ, donc! Après des débuts difficiles en 2003-2004 (suite à la fusion avec DELTA DIFFUSION), MEDIAPOST avait pris ses marques et était devenu le N1 de la distribution non adressée avec jusque 30 000 salariés au plus fort de son activité.

Aujourd’hui LA POSTE avec les 4000 salariés reclassés de MEDIAPOST peut-elle assurer la distribution des ISA, c’est-à-dire de la publicité, mais aussi surtout de la communication institutionnelle? Surtout le veut-elle? Le prévoie-t-elle même? Rien n’est moins sûr.

Quelques chiffres d’abord : en 2023, l’activité ISA de MEDIAPOST a générée une perte de près de 50 millions d’euro, dûe à la baisse des volumes ISA des retailers, en raison d’un effet d’anticipation sur la loi OUIPUB. Ceci a amené le groupe à reclasser en Février 2024 une petite part de ses salariés dans sa maison mère, à savoir le groupe LA POSTE dont l’activité principale et historique est non pas l’ISA, mais le service postal, le courrier adressé. Aujourd’hui c’est LA POSTE qui facture les distributions des clients, paye les salariés et MEDIAPOST a même quitté le SDD, le syndicat de la distribution directe.

Mais le groupe LA POSTE pourra-t-il continuer la distribution non adressée en 2025 si la Loi OUIPUB est étendue? Rien n’est moins sûr! Avec des taux d’apposition (sur ls zones tests) donnés par l’ADEME à 8%, mais probablement plus proches des 15%, on voit mal comment La Poste pourrait amortir des tournées d’ISA, même si elles sont distribuées par le facteur. En effet, les tournées de courrier elles mêmes sont déficitaires, et les boîtes aux lettres où il y a de la publicité ne sont pas nécessairement celles où il y a du courrier. La distribution des ISA représentera un cout supplémentaire et ne sera pas du tout neutre sur la tournée du facteur. Si perte il y avait avant de mutualiser, perte il y aura probablement après la mutualisation ISA-Courrier adressé.

D’ailleurs, ce sont deux métiers totalement différents. Le poids et le volume des ISA implique des équipements et une organisation des tournées totalement différente de l’organisation minutieuse de la tournée de courrier adressée. Quand on connait les difficultés qui existent déjà pour le recrutement des facteurs, leur fidélisation et leur formation (au vu de l’état actuel du marché du travail), on peut avoir des doutes sur la réussite d’une formule de distribution mixte ISA-courrier adressé.

Resterait alors la tentation de vendre de la distribution de publicité sous enveloppe adressée. Mais il est probable que cette solution ne décollera jamais et restera marginale. En effet :

  • les avantages concurrentiels de l’ISA étaient des coûts de distribution faibles, une quantité importante de prospects touchés, la possibilité de toucher indistinctement des catégories socio-professionnelles, des zones géographiques et donc d’aller chercher du nouveau prospect. Tous ces avantages disparaissent dans une distribution adressée
  • le profil sociologiquement CSP- des apposeurs OUIPUB finira par lasser les annonceurs et exclut d’office un grand nombre d’annonceurs potentiels (promoteurs, vérandalistes, services à domicile) qui visent des CSP +++
  • ce profil de consommateurs de promotions devrait être rapidement capté par des outils de fidélisation et promotions numériques moins chers et plus addictifs que l’ISA
  • la répétition des promotions sur une cible limitée finira par entrainer une baisse importante du ROI par effet d’usure, un peu comme les fichiers d’adresse mail optin qui ne donnent plus aucuns retours.
  • enfin la principe de la distribution adressée sur OUIPUB sera pris en permanence entre deux écueils : si le taux d’apposition dépasse les 50%, l’ISA reprendra les pleins pouvoirs, si le taux d’apposition est trop faible, même une distribution adressée sur fichier d’apposeurs OUIPUB n’aura plus aucun intérêt.

Ainsi, pour conclure, il n’est pas certain que même le puissant Groupe LA POSTE puisse sauver l’ISA, si la loi OUIPUB est généralisée sur toute la France en 2025….

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